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rookie78
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Machines "Compound " en modélisme Empty Machines "Compound " en modélisme

Lun 2 Juil - 10:46
Les machines à vapeur de type « Compound » ou en bon français « à expansions multiples »… Beaucoup de références dans la littérature spécialisée. Mais pourquoi les avoir développer ? Quel en est vraiment le principe ? Serait-il intéressant de les adapter à notre échelle et quel(s) bénéfice(s) pourrions-nous en espérer ?
Pour tenter de répondre à ces questions, il a fallu se documenter, analyser le tout et regarder les détails… Après moult investigations nous arrivons à la conclusion que.... Et bien j’espère que vous pourrez conclure vous même !
Note: Comme d'habitude, il faut bien quelques notions de base pour l'analyse... Mais vraiment rien de compliqué cette fois. Les moins curieux peuvent toujours aller directement aux conclusions...

• Principe de base d’une machine à vapeur :
Le principe est très simple : Une pression appliquée sur un piston génère une force et le piston en se déplaçant génère un travail.
Si « S » est la surface du piston, « Pa » la pression constante de la vapeur, Pe la pression à l’échappement, « L » le déplacement du piston de la position A à la position B,  « V » le volume du piston compris entre les points A & B  et Wa,b le travail fourni par la vapeur lors du déplacement de A à B :
La force exercée sur le piston sera : F= (Pa-Pe) x S
Et : Wa,b = F x L = (Pa – Pe) x S x L = (Pa –Pe) x V
On peut tracer un graphique avec en ordonnée la pression et en abscisse le volume balayé ou ce qui est équivalent mais plus parlant (la surface du piston étant constante) la position L du piston. La surface du rectangle ainsi dessiné représente la quantité de travail Wa,b.
Tout cela est résumé sur la vue suivante :

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Ce genre de machine peut être à « simple effet » (on admet la vapeur que d’un seul côté du piston) ou « à double effet » (on admet la vapeur séquentiellement d’un côté du piston, puis de l’ autre, inversant admission & échappement). Il est aussi dit « à pleine  pression » puisque l’on admet la vapeur durant toute la course du piston.

• La machine à détente (ou à expansion) :
Les premières machines à vapeur à « pleine pression » avaient un rendement extrêmement faible puisque l’on rejetait dans l’atmosphère, à l’échappement, de la vapeur toujours pratiquement à la pression d’origine. La majeure partie des calories dépensées pour la production de la vapeur étaient gaspillées. Fin 18ème, début 19ème apparurent les premières machines utilisant vraiment l’énergie contenue dans la vapeur avec le principe de l’expansion (ou détente).
Le système est facile à comprendre, tout est dans le nom : On va admettre la vapeur seulement sur une petite partie de la course du piston et laisser la vapeur se « détendre et travailler » (baisse de pression & augmentation du volume) sur la fin de la course. La détente sera approximativement adiabatique (pas d’échange de chaleur avec l’extérieur) et donc la relation entre pression et volume sera de type hyperbolique (pvᴷ=cste). Typiquement, la vapeur était admise sur 30 à 40% de la course du piston.
Les formules que nous avons établies ci-dessus restent valables, mais pour un petit déplacement et une petite variation de pression. Il faudra en faire la somme sur toute la course du piston :
   Wa,b = ∫(dp x dv)
La somme des « dv » sera bien sur le volume total balayé. Et la somme des pressions aboutira à une pression moyenne « Pm ». Le travail sera donc :
Wab = (Pm –Pe) x V.
Le calcul de Pm n’est pas immédiat, mais on peut facilement visualiser « Pm » en reprenant notre graphique et en le modifiant pour un fonctionnement avec « détente ».

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Ce graphique est une représentation idéale d’un cycle. En pratique, d’autres éléments interviennent : Avance à l’admission, à l’échappement, compression en fin d’échappement, etc… Raffinements qui ne sont pas abordés ici. Nos anciens avaient inventé des enregistreurs mécaniques ( Richard, Crosby,etc…) qui permettaient l’enregistrement de ces cycles « pression vs volume » sur une simple feuille de papier. Sur la vue ci-dessous quelques diagrammes de relevés réels.

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On obtient ainsi une amélioration du rendement, même s’ il reste encore bien faible. Ce système était acceptable pour les locomotives. Mais il restait des problèmes de taille à régler pour les applications navales.

A terre, pas de soucis : Quand il n’y a plus d’eau on s’arrête pour faire le plein… Même chose pour le combustible, bois ou charbon. Il suffit de prévoir les stations de ravitaillement au bon endroit le long du parcours. Même si quelques fois ce n’est pas simple (voir pour les amateurs « Il était une fois dans l’Ouest…»)
En mer, situation plus compliquée : On ne peut pas se ravitailler en combustible et l’eau de mer (salée) ne peut pas être utilisée dans les chaudières. Il faut donc tout emporter avec soi. Modèle économiquement pas viable !
Intervient alors un coup de génie : L’ introduction du condenseur. Il est placé en série avec l’échappement et comme son nom l’indique, il permet de condenser la vapeur utilisée et donc de la recycler dans la chaudière. La consommation d’eau est réduite aux fuites et la réserve à emporter devient raisonnable. L’ utilisation de la machine à vapeur aux navires devient réalité et va révolutionner le commerce mondial.
Reste le problème du combustible : Meilleur sera le rendement et moins de combustible (charbon) sera à embarquer et donc plus importante pourra être la cargaison.

• Comment améliorer le rendement ?
Reprenons la formule donnant le travail :
Wab = (Pm – Pe) x S x L
Pour augmenter Wab, nous pouvons jouer sur 3 facteurs :
- Le différentiel de pression. Grâce au condenseur nous pouvons déjà diminuer Pe. Augmenter Pm revient à augmenter la pression d’admission, donc développer une chaudière « haute pression ».
- Augmenter la surface du piston.
- Augmenter la longueur de la course
Ces deux derniers points supposent également un re-dimensionnement de la chaudière pour qu’elle puisse délivrer des volumes plus importants de vapeur.

Toutes ces possibilités ont en commun les mêmes défauts : Elles conduisent à une augmentation très rapides des contraintes mécaniques sur tous les éléments, piston, bielles, paliers, cylindres, etc… Mais aussi sur l’encombrement général de la machine, taille de la chaudière et longueur/diamètre des cylindres. Le résultat devient vite monstrueux… Et certains ont été construits !
Dernier point négatif : Lors de la détente adiabatique, la vapeur se refroidit. Si l’on tente de détendre beaucoup la vapeur en une seule course, les phénomènes de condensation dégradent sérieusement la performance. Les parois des cylindres sont aussi soumises à des cycles de température plutôt sévères… Les tentatives de combattre ce phénomène en utilisant des « chemises » de vapeur autour des cylindres n’ont jamais été concluantes…

Alors ?... Alors, nouveau coup de génie d’un certain J. Hornblower qui se dit un beau matin de 1781 « Pourquoi ne pas réaliser la détente séquentiellement sur deux cylindres ? » Et dans la foulée, il déposa le premier brevet pour une machine « Compound ». L’idée sera ensuite reprise et perfectionnée Par A. Woolf (1804).
Nous y voilà donc…

• Machine « compound » ou « à expansions multiples » :
« Compound » se traduit littéralement par « composée » ou « cumulée ».
Ce type de machine sera à double effet.
L’échappement du cylindre « Haute Pression » (HP) est envoyé vers l’admission du cylindre « Basse Pression » (BP). Et pour la deuxième moitié du cycle, admission & échappements des deux cylindres s’inversent. La vapeur envoyée vers l’admission du cylindre BP commencera donc sa détente à la pression résiduelle du cylindre HP en fin de détente.
Il en existe divers types : Cylindres en tandem ou cylindres croisés avec ou sans réservoir intermédiaire.

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Le système est très facilement représenté sur le graphique représentant le travail. Il s’agit de répartir la détente complète sur les deux cylindres (En abscisse, cette fois on porte le volume puisque les sections des deux pistons ne sont pas identiques). Et on « coupe » en deux le cycle de détente:

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A noter qu’en fin de détente, les variations de pression deviennent faibles et le gain de travail peu intéressant. C’ est aussi dans cette portion que les problèmes de condensation sont maximum. Pour bien profiter de l’expansion multiple,  il faut travailler avec des pressions plus importantes et ne pas détendre trop bas. Le cylindre HP restant d’un diamètre raisonnable, on peut augmenter la pression d’admission sans créer de contraintes mécaniques excessives.
Ces machines ont été déclinées en « double », « triple » et même « quadruple » expansions en passant la vapeur successivement dans 2, 3 ou 4 cylindres de diamètres croissants.

• Puissance d’une machine « Compound » :
Le calcul du travail fournit par une machine « compound » est en général donné très simplement en considérant chaque cylindre indépendamment et en combinant les pressions appliquées à chaque face, leurs surfaces et la course. La formule communément utilisée est donc (en utilisant les notations de la vue précédente) avec L = course, Vhp = Shp x L & Vbp = Sbh x L :

Whp = (Pmhp – Pmbp) x Vhp
Wbp = (Pmbp – Pe) x Vbp

Et le travail total Wt= Whp + Wbp= (Pmhb – Pmbp) x Vhp + (Pmbp – Pe) x Vbp

Interprétation que tend à renforcer le diagramme coupé en deux. A noter que ces diagrammes étaient obtenus (enregistreur) en plaçant les prises de pression sur l’admission et entre les deux cylindres pour la partie HP ; entre les deux cylindres et à l’échappement pour la partie BP.

Mais bien que le total calculé de cette façon soit exact, la formule ne rend pas compte correctement de la réalité du travail fourni par chacun des cylindres.
Il faut bien comprendre que dans une machine compound, quelque soit le design, « tandem » ou « croisé », avec ou sans réservoir intermédiaire les deux cylindres sont totalement liés (mécaniquement & pressions) et n’en forme effectivement qu’un seul. Pour décortiquer le processus, prenons le schéma d’une machine « en tandem », réduit à sa plus simple expression : La machine telle que dessinée ne pourrait fonctionner que sur un demi cycle mais ça nous suffit pour faire le bilan des forces.

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Nous pouvons alors visualiser deux pseudo-pistons actifs :
- Le premier du diamètre du cylindre « HP » soumis d’un côté à la pression « Pmhp » et de l’autre à la pression d’échappement « Pe ». Les deux pistons étant mécaniquement liés, la pression intermédiaire ne joue aucun rôle sur les surfaces Shp, exerçant des forces de même intensité mais opposées . La partie hachurée est neutralisée,
- Le deuxième est réduit à une couronne dont la surface est égale à la différence de surfaces entre les deux pistons. Elle est soumise d’un côté à la la pression « Pmbp » et de l’autre à la pression d’échappement « Pe ».
La course étant notée « L », le travail fourni par chaque piston s’écrit alors :

Whp = (Pmhp – Pe) x Shp x L
Wbp =  ([Pmbp – Pe) x (Sbp – Shp)] x L = [(Pmbp – Pe) x Sbp – (Pmbp – Pe) x Shp] x L
Wt = Whp + Wbp et en développant le tout :
Wt = [(Pmhp – Pmbp) x Shp x L] + [(Pmbp – Pe) x Sbd x L])
Wt = (Pmhp – Pmbp) x Vhp + (Pmbp – Pe) x Vbp

Nous retrouvons bien la même valeur pour Wt que dans la formule donnée au départ, mais la répartition entre les deux cylindres est différente ! C’est cette répartition qu’il faudra prendre en compte pour optimiser le ratio des diamètres des cylindres HP et BP.

• Quel est le rapport idéal entre les diamètres des deux cylindres ?
Là, c’est la question « à mille balles » !!! D’après mes lectures, il me semble qu’il existait autant de méthodes pour calculer ce ratio que de bureaux d’études !
Le points commun aux diverses approches me semble être d’essayer d’obtenir le même travail sur les deux cylindres. Ca paraît du bon sens…
Ensuite, chacun ajoute ses conditions. Et il y a tellement de variables qu’il faut bien en fixer quelques unes… Par exemple :
-  Avoir la même force maximum sur chaque piston.
- Même ratio d’expansion de la vapeur dans les deux cylindres.
- Ratio idéal d’expansion dans un cylindre défini comme 2,73 selon un calcul plutôt pointu…
- Puis, en général, on ajoute quelques contraintes liées au design général de la machine et à son utilisation : Pression max de la chaudière, Ømax du cylindre BP, course max, travail total max désiré, etc…
- Et, il faut bien le dire, beaucoup de facteurs issus de l’expérience. La vapeur n’a jamais été une science exacte et reposait beaucoup sur l’expérimentation et le « coup de main »

A titre d’exemple voici les ratios obtenus par différentes méthodes pour un même navire US, «Galena » (Source Steam-Engine design  M.J Whitham - 1889)
- Rea : 1,39
- « No Drop » : 1,27
- Rankine : 1,58
- Seaton :1,73
- Méthode graphique :  1,63
Finalement, la machine du Galena avait été construite avec un ratio de 1,52…

• Avantages & inconvénients de l’expansion multiple:
Du côté des avantages, on note :
- La possibilité de travailler avec des pressions plus élevées sans accroissement démesuré des contraintes mécaniques, le piston HP pouvant être de diamètre réduit.
- Une meilleure exploitation de l’énergie de détente.
- Une réduction des phénomènes de condensation ( avec une pression plus élevée au départ on peut éviter de descendre trop bas en détente)
- Et au final un meilleur rendement global entre énergie fournie à la chaudière et énergie récupérée sur l’arbre de sortie.
Côté inconvénients :
- Un mécanisme beaucoup plus complexe. Il faut commander avec le bon timing tous les clapets d’admission & d’échappement. Combiné avec les avances et retards, c’est un joli problème frôlant le grand art . Imaginez une machine avec 4 cylindres en cascade…
- Multiplication des pistons, tiroirs, etc… et donc multiplication des sources de fuites.
- Multiplication des pièces en mouvements et des problèmes de graissage.
- Au final, un coût de fabrication nettement plus important.

• Et le compound en modélisme alors ?
1 - Les machines à vapeur en modélisme fonctionnent pratiquement « à pleine admission ». Plusieurs raisons :
. C’est le moyen le plus simple d’augmenter la puissance.
. En modélisme, tout ne peut pas être mis à l’échelle ! En particulier, vouloir réduire l’admission à 30% de la course imposerait des dimensionnements des lumières admission/échappement beaucoup trop petits et des problèmes de contrôle du déplacement des tiroirs.
Plusieurs fabricants réputés de modèles réduits d’ensemble vapeur m’ont fait à peu près la même réponse : Leurs modèles fonctionnent avec une admission allant de 85 à 95% de la course. Et la réduire serait pour eux illusoire. Je n’ai jamais construit un moteur et ne peux que leur faire confiance.
Or, si vous reprenez les formules du travail dans une machine « compound » il est vite évident que si la pression d ‘échappement du cylindre HP est sensiblement la même que celle à l’admission, la contribution du cylindre HP tend vers zéro (Dans la formule du travail cela se traduit par Pmhp = Pmbp). On aurait le même résultat en ayant un seul cylindre de la taille du BP branché directement sur l’admission.

2 - La «  détente » n’est pas un phénomène instantané et prend un « certain temps ». Nos modèles réduits tournent vite et la détente aurait bien du mal à se faire utilement.

3 - Les « frottements » sont une des choses que l’on ne met pas vraiment à l’échelle (état de surface, etc...). On a rien à gagner à multiplier les mécanismes en mouvement.

4 – L’ autonomie liée au rendement n’est en général pas une issue sur nos modèles : Un ensemble tank gaz/chaudière/moteur/hélice bien proportionné permet une navigation de 20 à 40minutes selon le style de pilotage, ce qui est déjà bien. Naviguant majoritairement en eau douce, pour augmenter l’autonomie il sera beaucoup plus efficace d’installer une pompe de remplissage et/où d’augmenter la taille du tank à gaz que de passer au « compound ».

5 – Nous travaillons en général avec des pressions de vapeur relativement modestes. Et du coup, il n’y pas beaucoup de marge pour la détente.

Il est par ailleurs très instructif de regarder l’évolution des rendements des machines à vapeur ( ratio Energie à la sortie du moteur/Energie de combustion). Ca nous donne une idée des gains possibles :
1715 : 0,5% (non,non , ce n’est pas une erreur !)
1777 : 2% (Watts)
1870 : 9%
1914 : 12%
En deux siècles, grâce à l’ensemble des avancées techniques brièvement décrites ci-dessus, le rendement a été multiplié par 24 ! Impressionnant, mais il reste bien faible. On partait de loin ! Et pour aller au delà de 12%, il a fallu faire un autre saut technologique et passer aux turbines.
Alors, à notre échelle, qu’elle serait le gain en passant à un compound???

En résumé et au vu de tout ça, je dirais que (et ça n'engage que moi...):
- Si l’objectif est de gagner en puissance, j’augmente pression et taille/nbre des cylindres et bien sur le débit de la chaudière.
- Si l’objectif est de gagner en autonomie, je travaille sur les performances de la chaudière, j’installe une pompe de remplissage en eau et je re-dimensionne le tank à gaz.
- Si je veux faire de la belle maquette, me faire plaisir en ajoutant une « complication » (comme disent les horlogers), plancher sur une belle mécanique, me donner un nouveau challenge alors oui, je me lance dans une « compound ».

Et vous, votre avis ou votre expérience ?

Pour ceux qui souhaitent approfondir la techno « compound »  je ne peux que conseiller la lecture des ouvrages suivants (il en existe sûrement d’autres) :
- Steam-engine design M.J. Whitham 1889
- Steam engine practice C. Smith1885
- Thermal engineering R.K Rajput
De larges extraits sont disponibles sur Google. A noter : Ils sont en anglais un peu archaïque du 19ème siècle. Je me suis largement inspiré de ces ouvrages pour écrire ce résumé.
 Marcel.
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