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rookie78
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 Capacité d'évaporation d'une chaudière Empty Capacité d'évaporation d'une chaudière

Lun 15 Nov - 20:59
Bonjour,

Un membre du Forum (plutôt timide…) et utilisateur de « VapCalc », m’a contacté pour me demander d’où sort la fameuse valeur du coefficient d’évaporation de « 4 grs d’eau/dm2 » que tout le monde semble utiliser. Bonne question !!!
La réponse rapide et simple serait : « Basé sur l’expérience et ça marche plutôt bien ». Bon, c’est sans doute un peu court et on peut quand même regarder de plus près les phénomènes de transmission de chaleur dans nos chaudières. Ce qui permettra aussi de rappeler quelques trucs de base pour la conception/construction d’une chaudière.
Pas de grandes formules compliquées, juste les 4 opérations arithmétiques de base….

• La théorie des échanges thermiques:
Nous avons une source chaude et nous voulons transmettre la chaleur générée à une masse d’eau froide. La « chaleur » devra donc passer à travers plusieurs interfaces et milieux solides. On peut représenter cela avec un petit dessin :

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Et chaque interface ou milieu va opposer une certaine résistance au passage de la chaleur.

Note :
- Pour nos besoins et la précision requise nous allons utiliser les formules simples s’appliquant aux « surfaces planes ». Les équations complètes traitant des « tubes » font intervenir des choses assez tordues comme les logarithmes népériens sans vraiment améliorer la compréhension du système…
- Nous nous limitons aux effets de conduction et en première approximation ne tenons pas compte des effets de rayonnement…


Avec ces remarques, l’équation générale définissant la puissance transmise et que nous allons utiliser s’écrit :
P = U * A * (Tg -Te)
Avec P en W (c’est à dire Joules/s) ; U le coefficient de transmission thermique en W/(m2x°K) ; A la surface d’échange en m2 ; Tg et Te les températures respectivement du gaz et de l’eau en °K ou °C (la différence sera la même).
C’est à dire simplement que P est proportionnelle à la surface d’échange et à l’écart des températures. Et U est le coefficient de proportionnalité. Ça paraît logique !!

U, « tel quel » , ne nous parle pas beaucoup. En fait il est défini comme l’inverse de la résistance thermique notée R .
U = 1/R
On retrouve une analogie avec un circuit électrique où une résistance de valeur élevée limite l’intensité du courant. Dans notre cas, une valeur élevée de R donnera une valeur basse de U et donc une puissance thermique transmise faible. Là encore, cela a un sens…

Enfin, R est en général défini à partir d’un coefficient de transmission thermique que nous noterons « h ». Et R=1/h. « h » prendra différentes définitions selon le type de transmission mais il permet de directement comparer les différents effets : un « h » important résultera en une faible résistance et donc une bonne transmission de la chaleur.

Ouf ! Voilà pour les définitions de base ! Pas si compliqué finalement…

Et comme dans un circuit électrique, les résistances s’additionnent lorsqu’ elles interviennent en série, c’est à dire comme dans notre exemple avec des couches successives. On aura donc une résistance totale « Rt » entre la source chaude et le fluide froid :
Rt = R1 + R2 + R3+….

• Application de la théorie à nos chaudières :
Reprenons le schéma général en l’appliquant d’une manière simplifiée à nos chaudières :

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Nous avons donc :
- Une résistance « Rg » correspondant à l’interface gaz/paroi intérieure du foyer
- Une résistance « Rs » correspondant à la fine couche de suie déposée sur la paroi intérieure du tube foyer.
- Une résistance « Rm » liée à la conductivité thermique du métal du tube foyer.
- Une résistance « Rc » correspondant à la couche de tartre déposée sur la paroi extérieure du tube foyer.
- Une résistance « Re » correspondant à l’interface paroi extérieure du foyer/eau.
Et notre résistance totale sera donc :
Rt = Rg+Rs+Rm+Rc+Re

Toute la difficulté est maintenant d’estimer les valeurs de ces résistances. Rappelons qu’elles sont définies à partir de coefficients de transmission thermique « h », qui dans l’industrie sont basés sur l’expérimentation. Nous allons donc essayer d’utiliser ce qui est publié sur le sujet avec une bonne dose de bon sens pour choisir des valeurs qui nous semblent raisonnables à notre échelle.

- Rg = 1/hg avec hg le coefficient de transmission thermique de type convection du gaz vers la paroi solide. En circulation libre il est compris entre 10 et 30. En circulation forcée à haute vitesse (plusieurs dizaines de m/s) il est compris entre 30 & 350. Nous sommes en circulation libre avec malgré tout une vitesse certaine des gaz propulsés par nos torches. Une valeur haute en circulation libre de 25 paraît raisonnable.

- Rs = 1/hs avec hs le coefficient de transmission thermique. Pour une chauffe au gaz les dépôts de suie sont limités et les valeurs documentées que j’ai pu trouver sont comprises entre 100 & 600. Nous ne faisons pas un usage intensif 24h/24h et nous allons donc plutôt choisir un coef  élevé (résistance faible). Allez disons 500. Et un petit nettoyage de temps à autre permettra sûrement de rester autour de cette valeur.

- Rm la résistance propre du tube foyer est donné par la formule Rm= e/hm avec e l’épaisseur en mètre et hm la conductivité du métal. Là nous avons des valeurs bien définies : hm= 390 pour le cuivre, 125 pour le laiton, 25 pour l’acier inoxydable.

- Rc la résistance due à la corrosion et l’entartrage est très peu définie dans la littérature, car sans doute très dépendante de sa composition et de son mode de dépôt. Potentiellement elle peut devenir très élevée et dégrader fortement la performance de l’échangeur et est donc monitorée de près dans l’industrie. Notre cas est différent : Nous utilisons de l’eau déminéralisée ; le tube foyer sera en cuivre ou inox et ne s’oxydera pas au contact de l’eau ; lors de la fabrication un brossage sérieux éliminera toutes traces des résidus de brasage. Dans ces conditions, Rc sera nulle.

- Re=1/he avec he le coefficient de transmission thermique de type convection entre liquide et paroi. Lorsque l’échange est avec de l’eau en convection naturelle, sans ébullition, he est compris entre 100 et 1000. Lorsque l’échange se fait avec de l’eau en ébullition nucléée (c’est à dire avec formation de petites bulles régulières se détachant du métal, grossissant gentiment et améliorant le transfert de chaleur au sein du volume) he est compris entre 2000 et 10 000. Large plage, mais le volume d‘eau dans nos chaudières est faible, les bulles devraient donc faire un assez bon boulot pour transporter assez uniformément la chaleur, et une valeur moyenne de 6000 devrait être raisonnable.

Toutes les résistances étant définies, nous pourrons calculer la valeur de U le coefficient de transmission thermique :
U = 1/Rt soit U= 1/(Rg+Rs+Rm+Rc+Re).
Pour la surface A, nous prendrons 1m2 pour la première partie de nos calculs.

Il nous manque les températures des gaz de combustion et de l’eau.
- Pour l’eau c’est simple et précis : Connaissant la pression de fonctionnement de la chaudière, il suffit de consulter les tables « Vapeur ».
- Pour le gaz c’est un peu plus incertain. La température théorique de la flamme d’un mélange propane/butane est 1900°C. Les gaz au départ du foyer seront certainement à une température largement inférieure disons 1300°C. A la fin du tube foyer (entrée de la cheminée) ils seront plutôt à une température estimée à 300°C. (Nous avions déjà débattu de ces valeurs lors des posts sur la conception de la chaudière de la Seekadet). La température moyenne précise serait à calculer avec des fonctions logarithmiques… Nous nous contenterons d’une moyenne arithmétique et donc la température des gaz sera Tg= (1300+300)/2= 800°

• Les calculs :
Nous avons pratiquement toutes les données nécessaires. Il ne nous manque que la température de l’eau. Dans l’exemple choisi, notre chaudière fonctionne à 3bars mano, soit 4 bars absolus. Une petite visite aux tables de vapeur nous donne à cette pression une température de l’eau de 142°C. Et nous notons au passage une enthalpie de vaporisation de 2 133Joules/gr d’eau vaporisée.
La différence de température sera donc : Tg -Te= 800 -142= 658°
Notre foyer sera en cuivre de 1mm d’épaisseur. Et pour simplifier le calcul nous prenons une surface standard de 1m2.

Les calculs sont simples ! Nous appliquons la formule :
- Calcul des résistances thermiques avec les coefficients choisis à l’étape précédente et donc de la résistance totale Rt.
- Calcul de U le coefficient global de transmission thermique. U=1/Rt.
- Calcul de la puissance P. Cette puissance est en W c’est à dire en joules/seconde et pour une surface de 1m2.
- Nous en déduisons l’énergie disponible par dm2 (division par 100) et par minute (multiplication par 60) exprimée en joules.
- Et connaissant l’énergie nécessaire pour vaporiser 1gr d’eau sous 3 bars mano nous calculons par simple division le poids d’eau que nous pourrons vaporiser par dm2 et par minute.
Ces calculs sont regroupés dans le tableau « Modélisation A » ci-dessous :

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Et nous trouvons une valeur de 4,4g vaporisée par dm2… Un peu plus que les 4gr usuels mais dans le même ordre de grandeur. Au fond la différence est faible quand on pense à tous les facteurs que nous avons dû choisir !

• Analyse :
Il est par contre très instructif et intéressant de regarder les différentes valeurs des résistances thermiques:
- La plus importante (et de très, très loin) est Rg, c’est à dire le passage des calories des gaz à la paroi.
- La résistance Re, passage du tube à l’eau est 200 fois moins importante que Rg. Et donc à condition de bien nettoyer l’extérieur du tube foyer à la construction, cette interface ne sera jamais un facteur limitatif des performances de la chaudière.
- Rm, la résistance de conductivité du métal, est 20 000 fois plus faible que Rg et donc ne joue pratiquement aucun rôle d’atténuation ! Doubler l’épaisseur ne changera pas le résultat final. Certes, nous avons pris du cuivre qui a une des meilleures conductivités de la chaleur. Mais même en prenant un acier inoxydable à la faible conductivité de 25 la résistance Rm reste 1000 fois inférieure à Rg. Donc au final, peu importe le métal utilisé.
- Le seul autre facteur pouvant jouer sur les performances globales est la suie. Dans notre modèle, Rs est environ 20 fois moins importante que Rg. C’est un facteur assez facile à contrôler avec un entretien disons annuel : Un rinçage à l’eau savonneuse du tube foyer devrait faire l’affaire.

En résumé, tout le secret d’une chaudière performante se résume à la configuration du tube foyer et de ses tubes bouilleurs ! Il faut certes y ralentir les gaz… Mais pas trop et s’assurer d’un enveloppement aussi uniforme que possible des tubes bouilleurs par les gaz chauds. Le diamètre du tube foyer doit être suffisant pour y loger les tubes mais pas trop ce qui poserait des problèmes de tirage et de vitesse des gaz.
Puisque cette vitesse des gaz est un facteur important on peut regarder son influence sur le résultat final. Dans notre « Modélisation A » nous avions choisi une valeur relativement haute de 25 pour hg (circulation libre). Refaisons une modélisation « B » avec une valeur un peu plus faible de 20 :

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La vaporisation tombe à 3,5gr/mn/dm2. Cette fois un peu en dessous de la norme de 4…

Donc pour conclure, il n’y a pas de recette magique pour optimiser les performances d’une chaudière. Tout le problème est concentré sur la conception et géométrie du foyer. Seule l’expérience pourra aider… De l’art en quelque sorte.

Et finalement, au vu du nombre de coefficients entrant en jeu, la réponse courte d’introduction « 4gr/dm2/mn est basé sur l’expérience et ça marche plutôt bien » n’était pas si ridicule…

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